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samedi 7 mai 2011

Maud et la Wyverne

Je vais vous parler cette fois d'un autre Semi-Dragon (j'ai déjà présenté le Lindorm auparavant) la Wyverne (appelée aussi Wyvern). Les Wyvernes sont d'énormes Semi-Dragons composés d'un long corps de serpent aux écailles d'un vert lumineux et irisé, prolongé d'une queue recourbée en forme de dard, de deux pattes d'aigles et de deux ailes. L'iconographie chrétienne a souvent assimilé ces créatures aux représentations classiques que l'on se fait de Satan. Ces êtres sont considérés comme les symbole de l'envie, de la peste et des métaux vils en alchimie.


Représentation classique de la Wyverne pour les rôlistes.

Voici justement la légende la plus connue associée à la Wyverne, légende qui se situe dans le Mordiford.

Les parents de la petite Maud ne voyaient aucune objection au fait que la fillette ait un animal familier, un chien, un chat,... Mais, celui qu'elle leur avait ramené, aussi minuscule et joli fût-il, ne pouvait en aucun cas leur convenir. Elle l'avait découvert l'après-midi même. Elle se promenait en effet dans les bois, près de chez elle à Mordiford (dans le comté du Herefordshiren en Angleterre) Elle avait aperçu un minuscule animal qui semblait égaré dans les buissons, qui se tenait tristement au milieu d'un bouquet de fleurs. La délicate créature qui avait sans doute perdu sa mère, avait l'apparence d'un Dragon : son corps de forme allongée, était vert et parcouru d'écailles étincelantes, qui luisaient telles des pierres précieuses au soleil (je ne sais pas pour vous mais je l'aurais embarquée aussi sec chez moi...). La petite créature se tenait assise sur ses deux pattes et agitait avec une touchante obstination ses deux petites ailes membraneuses, mais il était clair qu'elle était bien trop jeune pour pouvoir déjà parcourir les cieux. Dès qu'elle avait aperçu Maud, sa tristesse s'était cependant évanouie et elle s'était mise à sautiller gaiement autour d'elle, ravie de ne plus être seule.


La fillette, ravie de trouver ce petit compagnon inattendu; après avoir joué un long moment avec la Wyverne trouva naturel de la ramener chez elle. Et maintenant elle était là, posée sur le sol du logis, les parents de Maud la regardant avec horreur. En vain l'enfant tenta de plaider la cause de son compagnon de jeux, affirmant qu'il était trop petit et trop mignon pour être dangereux... Ses parents lui ordonnèrent d'un ton qui n'admettait aucune réplique, de le ramener aussitôt à l'endroit où elle l'avait découvert. Dès qu'elle fut sortie, ils refermèrent la porte de la demeure et l'observèrent par une fenêtre afin de s'assurer qu'elle prenait bien la direction du bois ou elle était allée se promener quelques heures auparavant.

Maud et la Wyverne en train de jouer.

Dès qu'elle fut hors de vue du joug parental, la fillette quitta le sentier qui menait vers le bois et se dirigea vers sa cachette : un petit coin de forêt invisible du chemin, où elle avait l'habitude de passer de longues heures à jouer seule, à l'écart du monde. Elle y installa son nouveau petit compagnon et elle vînt le voir chaque jour, jouant avec lui, lui apportant de la nourriture, le tenant à l'abri du regard de ses parents et des habitants du Mordiford.


Au fil des mois, la bête ne cessa de grandir se transformant à une vitesse inquiétante. Le mignon petit Dragonneau que la petite fille avait recueilli se changea peu à peu en une Wyverne adulte (là je reste sceptique au niveau de la croissance de la bête mais bon la Wyverne est parfois vue par les rôlistes comme une cousine éloignée des Dragons véritables et classée comme un Dragon mineur, appelé aussi Drake ou Drakon) d'une taille impressionnante, ses écailles durcirent, devinrent d'un vert iridescent avec des bords aussi tranchants que des lames de rasoir, ses ailes s'épaissirent comme celles des chauve-souris et un dard mortel se développa à l'extrémité de sa queue recourbée.

Dessin au trait d'une Wyverne.

Bientôt, les soucoupes de lait que la fillette apportait à la créature chaque jour, ne parvinrent plus à apaiser sa faim sans cesse grandissante. Tout naturellement, elle commença à aller chercher sa pitance ailleurs. Les fermiers des environs perdirent de nombreuses têtes de bétail et il ne se passa guère de temps avant que le coupable de ces forfaits ne soit identifié. La Wyverne de Maud avait apprit à apprécier la chair des moutons et des vaches. Quand les paysans les plus audacieux vinrent le traquer dans sa retraite, elle se défendit vaillament, en tua quelques-uns et découvrit à cette occasion une autre nourriture bien meilleure que son ordinaire : la chair humaine ! (petite info au passage, il paraitraît, selon notre régime alimentaire que ça a le goût de viande de porc...)



La fillette terrifiée par le comportement de son ancien compagnon de jeu, le supplia de mettre un terme à ses attaques contre les habitants du village, mais en vain. Même les pleurs d'une fillette désolée ne peuvent l'emporter sur la nature carnassière et les instincts de prédateur d'une vraie Wyverne. En devenant adulte, la bête multiplia les ravages dans toute la contrée. Une seule personne n'avait rien à craindre d'elle : Maud, celle qui l'avait receuillie et choyée dans sa plus tendre jeunesse. Elle seule pouvait cheminer en sécurité à côté de la créature, caresser ses griffes meurtrières, ou plonger sans appréhension son regard dans ses yeux de braise. Telle était la puissance de l'amitié et de l'amour.


Mais cela n'altéra pas cependant le cours inexorable des évènements... Un jour vint où la tyrannie de la bête ne fût plus supportable pour les habitants de Mordiford. Monté sur un solide destrier, protégé par une lourde armure, un des hommes de la plus illustre famille de la contrée : les Garston, partit dans les bois à la recherche de la bête, bien décidé à mettre un terme à son existence. Il avait mis un pied à terre pour s'enfoncer dans le sous-bois quand brusquement, cachée jusque-là par le feuillage, une énorme masse verte surgit devant lui. Il brandit instinctivement son bouclier pour se protéger des flammes crachées par la Wyverne, (logiquement les Wyvernes ne crachent pas de flammes mais génèrent un souffle empoisonné hautement toxique) puis brandit sa lance et la plongea dans la gorge interminable du Dragon, d'où jaillit aussitôt un épais flot de sang noir. Il saisit ensuite son épée et s'apprêtait à couper la tête de la créature agonisante lorsqu'une fillette surgit à son tour des broussailles, hurlant de colère et commençant à lui lancer des pierres.


Désemparé, ne sachant que faire, il battit rapidement en retraite. Avant de s'éloigner en direction du village pour aller annoncer aux paysans que leurs épreuves étaient désormais terminées (et qu'ils pourraient à nouveau dormir en paix sur leurs inconfortables couches de paysans...), il eut cependant le temps de contempler l'étrange spectacle d'une Wyverne égorgée pleurée par sa seule amie : une petite fille nommée Maud, qui venait de perdre à tout jamais les illusions de son enfance...

Idraemir

8 commentaires:

  1. Oui une Wyverne c'est plus classe qu'un chien =) quelle différence fais-tu entre la Vouivre et la Wyverne? Peut-on associer la première à une femme serpent avec une escarboucle et la seconde à un semi dragon? mela380@hotmail.fr

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    1. Je comptais justement me pencher sur la question. Mais sans vraiment m'être penché dans mes livres je dirai que la Vouivre d'origine celtique était vue comme une femme pourvue d'un tronc serpentin et pouvant se changer en Dragon si l'impudent voulait lui dérober son escarboucle.

      Tandis que la Wyverne plus tardive, pourrait être une évolution du mythe vers tout autre chose alors que la Vouivre est devenue la Mélusine que beaucoup connaissent bien.

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  2. La vouivre aurait aussi des ailes il me semble et son escarboucle est en réalité son œil unique sorte de charbon ardent qu'elle ne quitte que lorsqu'elle se baigne

    http://pages.videotron.com/chimere/bestiaire/vouivre.html

    mais j'ai l'impression que beaucoup ont fait l'amalgame vouivre/wyverne (sur wikipédia, je sais ce n'est pas une référence >_<",ce serait à peu près la même chose sans trop l'être non plus bref c'est le bazar XDD) D'accord merci pour la réponse ça fait du bien de parler à une experte parce que c'est un peu le capharnaüm x')

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  3. Pour les ailes tout dépend de la forme (forme serpente ou draconique) ou de la version. L'escarboucle a beaucoup de symboliques (dans la magicologie verte également dont j'ai de bonnes notions) donc c'est assez variable encore une fois.

    Il faut toujours vérifier les sources avant de prendre un élément pour argent comptant, wiki peut parfois être utile, d'autres fois... pas vraiment. La Vouivre a de nombreux autres noms ce qui prête à confusion. Par-contre, je ne peux rien te garantir sur le sujet tant que je n'aurai pas poussé ma recherche là-dessus vu que les mythes celtes sont souvent fragmentaires, recomposés ou déformés en diable...

    De rien, c'est toujours un plaisir (expert, expert, n'exagérons rien).

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  4. A ton avis, peut-il exister une romance entre un dragon et un être humain ?

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    1. Hummm, oui et non. en occident (dans les mythes teintés de catholicisme) on ne parle pas vraiment d'histoire d'amour (la princesse séquestrée par le Dragon qui va la dévorer)... mais il existe un bon exemple : la Vouivre (à ne pas confondre avec la Wyverne comme le font beaucoup d'auteurs, et ce, même si elles se ressemblent). L'écrivain Marcel Aymé décrira d'ailleurs dans son roman ("La Vouivre"), une sorte de romance entre la Dragon et un paysan. Il existe également un autre exemple plus éloquent en la matière, mais ce dernier je le conserve dans ma manche jusqu'à la publication d'un article sur le sujet.

      Dans la mythologie orientale, il y a aussi des chances d'y découvrir une histoire d'amour entre humains et Dragons vu que certains Dragons chinois pouvaient se présenter sous une forme humaine (l'empereur de Chine était d'ailleurs censé être le descendant de certains Dragons). La déesse Nuwa par exemple (à corps de serpent), est censé avoir façonné les hommes à partir de glaise tout en leur offrant la capacité de procréer (elle est également vue comme la patronne des mariages).

      Il existe d'autres exemples ici et là mais ils ne sont pas si faciles à dénicher... En espérant avoir répondu à ta question.

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  5. Merci pour cet article détaillé ! Est-il possible d'en avoir les sources ? Je n'ai pas su les voir et elles m'intéressent !
    J'ai d'ailleurs cru reconnaître des infos tirées de l'Encyclopédie du Merveilleux d'Edouard Brasey, un livre que j'adore !

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    1. Bonjour.

      De mémoire, j'ai employé principalement les travaux du cryptozoologiste Karl Shuker.

      Je ne suis cependant pas sûr d'avoir employé le livre de Brasey (le second tome de sa trilogie) pour cet article.

      Merci pour votre commentaire. Il faudra cependant que je rénove ce texte de fond en comble pour l'améliorer et boucher quelques vides et imprécisions (l'article date un peu je dois l'avouer).

      Au plaisir de vous lire à nouveau.

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